Bleu passé
Résumé
Autrefois, les théâtres n'étaient pas tendus de rouge, mais de bleu. Un bleu sans nom, sourd, qui ne bruit que dans la mémoire. je pourrais vous prier Entrez ! Entrez dans le théâtre du passé, découvrez mes gens et mes pays étranges, voyez ma collection de riens. Derrière le rideau bleu passé, peu de choses des souvenirs, des mensonges. Je les confonds souvent, fabulant quand je cherche un récit exact, me souvenant quand je crois faire une menterie. Les objets de ma collection, on pourrait presque les toucher à travers le temps un piano à queue Pleyel des années vingt, un disque en matière plastique rouge, un lecteur de cassettes, un sifflet, un poste de radio, une série d'enregistrements d'opéras tapissant les murs d'une demeure siennoise, des cloches à New York au bord d'un fleuve invisible et même une camionnette dans la banlieue. De vieilles choses, pas forcément délabrées - certaines ont gardé leur fraîcheur pimpante -, des vestiges, les déchets de vies échouées, aussi incompréhensibles qu'elles. Pourtant, même en les collectant avec patience et hargne, jamais je ne retrouverai la scène entière. Ce qui fut, l'effort pour le retrouver, la patience d'en faire le récit, ces trois moments ne se relient pas comme la scène, le rideau et le spectateur. Le passé n'est pas derrière le rideau séparant le salon de musique du dehors, où l'enfant rêvait de la vraie vie. Il n'est pas non plus le rideau lui-même. Seulement son bleu et une étoffe de poussière.
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